THE FNAIM CONJUNCTURE LETTER
Le marché du logement reste dynamique, mais pourrait ralentir en 2020
Le marché du logement a connu une année 2019 exceptionnelle, avec un nombre de transactions qui a dépassé le million pour la première fois, avec 1 068 000 unités (en hausse de 11 %), et des prix qui ont poursuivi leur dynamique dans l'ancien en progressant de plus de 3 %. Le marché s'est caractérisé par une augmentation assez homogène du nombre de transactions sur l'ensemble du territoire, mais une évolution assez hétérogène des prix pour lesquels d'importantes disparités géographiques sont observées. La hausse des prix profite surtout à Paris et certaines grandes métropoles régionales, tandis que bon nombre de secteurs ruraux sont à la peine.
Le marché bénéficie toujours de taux de crédits très bas, d'une conjoncture économique plutôt favorable (poursuite de la baisse du taux de chômage notamment) et d'une confiance des ménages dans la situation économique qui se maintient à un niveau relativement élevé.
Outre ces éléments conjoncturels, le marché reste soutenu par des éléments structurels forts : le manque d'attractivité relative des autres placements financiers, le pouvoir d'achat relativement dynamique des ménages (en particulier en 2019) ainsi qu'une démographie toujours favorable (progression du nombre de ménages), un modèle français de crédit à l'habitat assez prudent (taux fixes pour les crédits, faible taux de créances douteuses, …) ou encore le fait que l'immobilier soit considéré comme un placement peu risqué dans un contexte général d'aversion au risque.
Le marché affronte toutefois quelques vents contraires en ce début d'année 2020. Après le mouvement social de décembre et janvier, il faudra observer durant les prochaines semaines l'éventuel impact de l'épidémie du COVID-19 sur le marché immobilier. Alors que l'ensemble des bourses à travers le monde commencent à dévisser, il est difficile de prévoir l'impact que pourrait avoir le virus sur la conjoncture économique. Même si un ralentissement pourrait se faire ressentir, notamment du fait d'éventuelles mesures de confinement, l'immobilier devrait être conforté dans son rôle de valeur refuge. Et face aux incertitudes sur les conséquences économiques de cette épidémie, la Banque centrale européenne (BCE) poursuivra sa politique de taux conciliante, maintenant ainsi des taux toujours très bas.
Deux autres facteurs plus structurels pourraient également freiner le dynamisme du marché : les restrictions sur le marché du crédit depuis le 1er janvier 2020 (intervention du HCSF, Haut Conseil de Stabilité Financière) et la rareté de l'offre de logements à vendre dans beaucoup de territoires.
Au total, en 2020, le marché devrait rester soutenu, les prix devraient poursuivre leur hausse sur un rythme similaire, mais les volumes de ventes devraient se replier autour du million de logements.
Un léger repli des ventes de logement à attendre en 2020 après l'euphorie de 2019
Le nombre de transactions de logements anciens poursuit sur sa lancée en dépassant allègrement le million de logements (1 068 000) en 2019 (+11 % sur un an), d'après le ministère. Il s'agit de la cinquième année consécutive de hausse des ventes. Cette hausse est générale et concerne l'ensemble des départements.
Le taux de rotation du parc[1] (qui prend en compte l'agrandissement progressif du parc) atteint le niveau inédit de 2,93 % en 2019 contre 2,65 % entre 2000 et 2005, autre période très dynamique en termes de vente.
Toutefois, ce nombre de transactions devrait se replier légèrement en 2020, sous l'effet des mesures de restriction de crédit (voir plus bas) et du manque d'offre de logements.
Une offre de logements toujours plus faible
Le nombre très élevé de ventes ces trois dernières années a fini par entraîner un tarissement de l'offre de logements sur certains marchés. Le baromètre FNAIM[2] trimestriel du marché du logement de mars 2020 indique une poursuite sensible de la raréfaction de l'offre, en face d'une demande qui se stabilise à un niveau élevé. 72 % des professionnels interrogés observent une baisse de l'offre. Cette tension sur l'offre pèse à la baisse sur les volumes et à la hausse sur les prix.
Prix : des grandes villes sur leur lancée, des zones rurales toujours atones
Traduction de ce déséquilibre du marché : pour la quatrième année consécutive, les prix de l'immobilier ont augmenté. Les prix poursuivent leur progression et accélèrent même un peu. Dans le baromètre FNAIM de mars, les professionnels anticipent une légère accélération des prix pour les six prochains mois. Cela corrobore les données de l'INSEE, pour qui les prix accélèrent légèrement au quatrième trimestre (+3,7 % sur un an, après +3,2 % au troisième trimestre 2019). L'institut observe toujours un écart important entre appartements (+5,2 %) et maisons (+2,6 %) mais avec un rééquilibrage entre Île-de-France (+3,9 %) et province (+3,6 %). Sur une plus longue période, 2019 a confirmé la tendance à la métropolisation, avec un marché à plusieurs vitesses où quelques grandes villes connaissent une forte dynamique (+7,3 % à Nantes et +5,7 % à Paris et Lyon en 2019, d'après l'indice de prix FNAIM) tandis que les zones rurales (qui représentent 22 % de la population) peinent à sortir de leur léthargie.
Note de lecture du graphique : L'indice « top 2-10 villes » regroupe les 10 plus grandes villes de France hors Paris : Marseille, Lyon, Toulouse, Nice, Nantes, Strasbourg, Montpellier, Bordeaux, et Lille. L'indice « top 11-50 villes » regroupe les 50 plus grandes villes de France en dehors des 10 plus grandes villes. Il s'agit dans les deux cas du prix des appartements. Pour l'indice « zones rurales », il s'agit du prix des maisons des communes appartenant aux unités urbaines classées comme « rurales » par l'INSEE (environ 28 000 communes, et 22% de la population).
Marché du crédit : les autorités prescrivent un calmant
Les taux des crédits immobiliers sont descendus à un niveau extrêmement bas. En lien avec la politique très accommodante des banques centrales, la France emprunte actuellement à taux négatifs sur 10 ans[3]. Les taux des crédits immobiliers devraient rester très bas en 2020. L'économie est vraisemblablement entrée dans un cycle de taux durablement bas.
En revanche, les conditions de crédit se resserrent. Après plusieurs avertissements sur les risques pesant sur le marché du crédit ces derniers mois, le HCSF a émis en décembre des recommandations qui devraient ralentir la production de crédit. Le HCSF recommande qu'à partir du 1er janvier 2020, pas plus de 15 % des nouveaux prêts présentent une durée dépassant 25 ans ou un taux d'effort supérieur à 33 % du revenu. En 2020, les prêts avec une durée excédant 25 ans devraient se raréfier (ils représentaient 5 % de la production en 2019), mais ce sont surtout les taux d'effort qui devraient se réduire : en 2019, plus de 26 % des crédits étaient consentis avec des taux d'effort de plus de 35 %, d'après la Banque de France.
Le HCSF est donc sorti de sa réserve en invitant les banques à plus de vigilance sur l'octroi des prêts, sans franchir le cap de mesures contraignantes. A ce stade, il s'agit d'une mesure de prévention et d'un remède face à l'assouplissement progressif des critères d'octroi des établissements de crédit ces dernières années. Les courtiers en crédit constatent tous que les banques appliquent de manière stricte ces recommandations depuis le 1er janvier 2020, ce qui pourrait contraindre certains acquéreurs à revoir ou même abandonner leur projet d'accession à la propriété ou d'investissement locatif. Les effets précis sur le marché du logement ne seront connus que dans les prochains mois. Le marché devrait ralentir sans toutefois s'en trouver bouleversé. Nul doute que le HCSF pourrait adapter ses recommandations en fonction de l'évolution du marché du crédit dans les prochains mois.
Le pouvoir d'achat immobilier commence à s'essouffler dans certaines grandes villes
À l'échelle nationale, le pouvoir d'achat immobilier[4] des ménages baisse très légèrement depuis 3 ans, la hausse des prix étant en grande partie compensée par la baisse des taux et l'augmentation du niveau de vie des ménages. Il se situe 17 % au-dessus de sa moyenne des vingt dernières années.
Ce pouvoir d'achat immobilier évolue cependant de manière très disparate. Il est actuellement 41 % au-dessus de sa moyenne de long terme dans les zones rurales dans leur ensemble, mais 13 % en-dessous de sa moyenne de long terme à Paris. A Paris et dans certaines grandes villes, la capacité d'achat des ménages s'effrite et se rapproche du dernier point bas atteint en 2012. La hausse des prix ne semble pas artificielle ni spéculative, mais elle devra ralentir dans les prochaines années.
Le marché du neuf donne quelques signes de rétablissement
À la différence de l'ancien, le marché du neuf est moins dynamique depuis deux ans. Les mises en chantier et permis de construire ont poursuivi leur repli en 2019. Sur un an à fin janvier 2020, 451 500 permis ont été délivrés (-1,6 % par rapport aux douze mois précédents) et 409 200 logements ont été mis en chantier (-1,2 %), d'après le ministère. La construction de maisons rebondit tandis que celle des appartements est en baisse.
Cependant, sur les trois derniers mois, on observe un net rebond des permis de construire (+8,3 % par rapport à un an plus tôt) qui ne s'est pas encore traduit dans les mises en chantier (-2,8 %) mais qui concerne aussi bien les maisons que les appartements. Ces derniers chiffres sont davantage conformes avec le ressenti des professionnels du bâtiment. Le climat des affaires et le taux d'utilisation des capacités de production sont en effet nettement au-dessus de leurs moyennes de long terme. Le décalage observé jusqu'alors pouvait principalement s'expliquer par l'inflation des prix, qui compensait les volumes atones.
Ces chiffres laissent augurer une possible reprise des constructions neuves après les élections municipales (les maires sont traditionnellement frileux pour accorder des permis de construire l'année précédant les élections). Le niveau des permis de construire sera donc à surveiller de près dans les prochains mois.
[1] Taux de rotation = nombre de ventes de logements / parc de logements.
[2] La FNAIM réalise tous les trimestres une enquête auprès des professionnels de l'immobilier pour recueillir leur perception récente et à venir du marché du logement ancien. 526 professionnels ont répondu à cette deuxième édition du baromètre FNAIM (mars 2020).
[3] Voir graphique. OAT = Obligations Assimilables du Trésor français, avec une maturité de 10 ans. Il s'agit du taux auquel l'État français emprunte sur une durée de 10 ans. Il sert de référence aux banques pour fixer leurs taux de crédit.
[4] L'indicateur de pouvoir d'achat immobilier de la FNAIM reflète la quantité de surface achetable chaque année dans l'existant pour une durée de remboursement de 20 ans, des taux d'intérêt moyens de crédits immobiliers (Banque de France) et des prix qui évoluent selon l'indice du prix des logements FNAIM. Cette approche prend également en compte l'évolution du niveau de vie des ménages (INSEE) mais ne tient pas compte de l'évolution des droits de mutation ni de l'apport personnel.